Interview with Richard Brunelle (1992)
by Wolfgang Amadepest
from Hard-Rock Mag
Hard-Rock Magazine : A présent que vous vivez tous
ensemble, Morbid Angel est-il devenu une communauté ?
Richard Brunelle (guitariste) : Une communauté ? Pourquoi pas une
secte ? Si nous habitons tous dans la même baraque, c'est
uniquement par souci d'économie. Dans les mois qui viennent, nous
sommes amenés à tourner de plus en plus et donc à
quitter notre domicile pour des périodes toujours plus longues.
Ca serait idiot que chacun d'entre nous possède son propre
appartement et qu'il consacre tous ses cachets à payer la
location d'un endroit u il ne séjourne qu'un mois sur trois.
Vivre tout le temps les uns sur les autres, ca ne doit pas aider
à éviter les frictions entre vous ?
Pas de problèmes de ce cote-la, on s'entend vraiment bien. Par
ailleurs, cette situation n'offre pas que des désavantages loin
s'en faut. Personne n'est jamais en retard aux répétitions
par exemple
Je crois qu'il faut savoir prendre un peu sur soi pour
l'intérêt collectif. Appartenir à un groupe, ca ne
se limite pas à pratiquer ensemble la musique deux heures par
jour. Un groupe ne peut survivre que si les individualités qui le
composent partagent des conceptions artistiques bien sur, mais aussi
culturelles et morales. Nous allons tous dans le même sens, celui
de faire de Morbid Angel le plus grand groupe du monde.
Ces valeurs culturelles incluent-elles en premier lieu le
satanisme dont vous vous êtes toujours réclamés ?
Plutôt que de parler de satanisme, je préfère
évoquer l'occultisme, l'aspect le plus obscur de la vie et des
croyances. Ces connotations sont celles qui conviennent le mieux
à la complexité et a violence du Death Metal. Ce qui me
gêne, en outre ; c'est le premier degré la
récupération de ces thèses à des fins
publicitaires. Tous ces groupes comme Deicide placent leur
adhésion aux thèses de Satan avant leur propre confiance
entre eux. Pour certains types, croire au diable, c'est d'abord refuser
de croire en dieu comme le commun des mortels. C'est idiot, mais la
plupart des gens qui se réclament du satanisme sont des paumes.
Ils le font par dépit parce qu'ils éprouvent le besoin de
se démarquer et de trouver une identité.
A la sortie de votre premier album, vous déclariez
déjà être le meilleur groupe du monde
Morbid Angel est certainement le meilleur dans sa catégorie.
Techniquement, en tout cas personne ne peut le contester. Sur le plan
des compositions, chacun doit se faire sa propre opinion en fonction de
ses goûts. Pour nous la musique n'est pas un hobby ou passe-temps
et ce qui nous sépare principalement des autres, c'est que nous
croyons en ce que nous faisons. Nous n'avons jamais changé de cap
depuis cinq ans. Cite-moi un seul groupe de Death Metal qui puisse en
dire autant !
Le fait que votre album comprenne une bonne moitié de
titres datant de plusieurs années semble indiquer que vous avez
déjà quelques difficultés à
créer
Pas vraiment en fait, ce que nous recherchions sur Blessed Are The Sick,
c'est une variété de climats aussi étendue que
possible. Notre approche de la musique évolue très
rapidement avec le temps et dons nos dernières compositions
n'avaient plus rien à voir avec celles d'il y a quelques
années, sur Thy Kingdom Come (NDLR : leur cultisime 45T
tiré à 666 exemplaires) par exemple. Il y a deux ou trois
ans, lorsque nous composions, nous cherchions d'abord à
enchaîner les plans les plus durs, les plus lents ou les plus
rapides possibles, tout en préservant une concordance sur le plan
de l'efficacité et de l'énergie.
Et aujourd'hui, que recherche Morbid Angel ?
Nous sommes devenus plus abstraits. Je crois qu'on cherche d'abord
à créer des ambiances. On travaille sur les impressions
que peuvent laisser telle partie de guitare ou tel plan de batterie.
D'ailleurs, on écoute beaucoup de trucs alternatifs, indus ou
cold, Laibach par exemple. Notre musique est devenue plus technique et
pourtant, je pense qu'elle est plus accessible. Ca semblait
intéressant d'exploiter ces deux facettes du groupe. Et notamment
ces anciens morceaux qui, somme toute, n'ont bas
bénéficié à l'époque d'une large
diffusion. Ca permettait de diversifier considérablement le
contenu de l'album.
Vous développez beaucoup de parties classiques sur Blessed
Are The Sick. Seriez-vous prêts à composer un concerto ?
C'est une question beaucoup moins innocente qu'il n'y paraît car
nous y avons effectivement songé plus d'une fois ? . C'est
peut-être un peu tôt pour l'instant. Mais Trey (Azagthoth)
et moi, nous nous reconnaissons tout à fait dans l'uvre de
Mozart. Nous avons besoin d'un champ d'expression beaucoup plus vaste et
spacieux que ne l'autorise pour l'instant le Heavy-Metal.